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L'univers de Frank William Batchou

L'univers de Frank William Batchou

Nous vous présentons dans ce blog toute l'actualité sur le Cameroun. Et une ouverture sur le monde... Merci pour vos commentaires et surtout vos critiques constructives


Dr Léopold Gustave Lehman : « Nous sommes asphyxiés… avec un contexte camerounais très difficile »

Publié par Franky Willy sur 26 Octobre 2010, 19:33pm

Catégories : #Interviews

Interview portrait d’un chercheur, d’un enseignant d’université et manager de Partec Afrique Centrale, entreprise spécialisée dans le matériel et réactifs biomédicaux, faisant dans la recherche, l’analyse et la formation des personnes engagées dans le combat contre le Vih/Sida, le paludisme et la tuberculose.

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Si l’on vous demandait de parlez brièvement de vous, que direz-vous ?

Je dirai que je suis Léopold Gustave Lehman. Je suis camerounais, enseignant chercheur à l’Université de Douala, manager de Partec Afrique centrale et citoyen paisible.

Depuis quand êtes-vous de retour de l’Allemagne où vous avez fait vos études ?

Je suis de retour au Cameroun depuis 1998. Et ça va de paire avec la question depuis quand êtes-vous parti ? Je suis parti du Cameroun en 1992 avec un DEA en tant que boursier allemand de l’organisme qu’on appelle Deutscher Akademischer Austausch Dieust (DAAD) qui est le plus grand organisme de coopération allemande en matière de chercheurs, bref d’académiciens.

Revenu au pays, qu’est devenu le Dr Lehman ?

D’abord, je rentre au Cameroun comme chômeur, sans-emploi. Heureusement, je bénéficie des programmes d’aide de retour en Allemagne et comme aide au retour, j’ai bénéficié du matériel de travail : un ordinateur, un microscope et un vidéoprojecteur. Ça veut dire que je pensais que j’allais probablement enseigner. Avec ce matériel, je pouvais qu’en même travailler et dans la quête du travail, je me suis débrouillé comme tout bon camerounais. J’ai fait du transport, du petit commerce, de l’agriculture, bref, je me suis occupé et je continue toujours à être très occupé.

Homme très ambitieux, vous êtes l’un des membres fondateurs du club des amis d’Allemagne qui est actuellement en pleine activité. Comment cette initiative a-t-elle vu le jour ?

L’initiative des amis d’Allemagne, l’association à laquelle vous faites allusion, est née des problèmes que les compatriotes et moi avons rencontrés. Vous savez que tout projet nait ou se justifie par la présence d’un problème et de vouloir le résoudre. Notre problème à nous était celui de la réinsertion. Quand on quitte son pays et qu’on séjourne longtemps à l’étranger, généralement on revient comme un étranger. On perd ses repaires et on a certaines difficultés à trouver un emploi, à créer un emploi, à s’occuper… Généralement, les gens qui partagent les mêmes problèmes se connaissent très bien et ont tendance à s’associer en bon compagnon de misère. Nous nous sommes mis ensemble en 2001et créer le Club des amis d’Allemagne (CAA) pour faciliter notre propre réinsertion et pallier à ce genre de problème à ceux qui devaient arriver après nous. Notre objectif était aussi de renforcer la coopération économique, socioculturel entre les allemands et nous. Nous avons partagé beaucoup de choses, beaucoup de valeurs, chacun avait sa propre histoire en Allemagne. Nous avons voulu prendre le bon côté de la chose et de les amplifier.

Et en neuf ans d’existence, êtes-vous satisfait du projet que vous avez mis sur pied ?

Pas encore satisfait parce que nous estimons n’avoir pas exploité au maximum nos potentialités et, ensuite, parce que nous pensons que le plus difficile reste à venir.

Que faites-vous donc pour être satisfait dans l’avenir ?

Nous avons déjà pu créer un cadre de rencontres où certains se sont faits des amis, des partenaires, un emploi ou encore des opportunités pour un emploi… C’est déjà quelque chose de formidable. Nous avons eu des projets et certains sont en cours. Par exemple : la domiciliation du Segment Experting Service (SES) qui est une ONG allemande qui emploi des retraités spécialisés et qui les met à la disposition des entreprises, des institutions camerounaises. Le S.E.S est domicilié au CAA. Nous avons une très bonne coopération avec les institutions comme l’Institut Goethe, la GTZ et bien d’autres. Nous faisons du conseil au cas par cas, des cours d’allemand au cas par cas, nous animons des journées comme celles-ci qui créent des rencontres entre les personnes intéressées par des activités commerciales, industrielles et académiques. Il y a beaucoup de choses qui ont été faites jusqu’à présent. Mais, comme je disais, le plus difficile et le meilleur restent à venir.

Vous êtes aussi le manager de Partec. Comment est-elle née cette structure ?

Elle est née à partir du problème du suivi des séropositifs au Cameroun ou dans les pays pauvres. Parce que le produit phare de Partec c’est le cytomètre, le flux de compteur de CD4. Le problème qui s’est posé quand la trithérapie est devenue accessible était le problème de comptage de CD4 qui est l’équivalent de la mesure de glycémie chez un diabétique ou de la mesure de l’hypertension chez un hypertendu donne des analyses indispensables du suivi longitudinal des patients. Sans comptage des CD4 au Cameroun, on soigne un peu à tâtons. C’est comme si on soignait un diabétique sans vérifier régulièrement son taux de glycémie. Donc, les médicaments, la trithérapie devenue accessible ne résolvait pas le problème du Sida. C’est pourquoi en 2003 quand nous commencions, il y a moins de 2 % des patients camerounais qui ont accès au comptage des CD4. Il a valu qu’il y ait des appareils qui soient développés et adaptés à notre contexte par la technologie, des appareils crées et développés par Partec… et qui sont des appareils qui permettent d’utiliser moins de réactifs, lyophilisés plus d’anticorps et ses réactifs étaient les éléments les plus chers. Quand nous commencions, les patients devaient débourser pratiquement 225.000 Fcfa pour la panoplie des analyses pré-thérapeutiques et vous savez que tous les camerounais n’ont pas assez de moyens. Beaucoup de patients mourraient parce qu’ils ne voulaient pas déjà se faire dépister, beaucoup de structures, d’institutions n’osaient pas attaquer des dépistages parce que le problème de suivi allait se poser. Nous avons pu avec ces appareils « démocratiser » le suivi des séropositifs et maintenant, les gens ont plus tendance à se faire dépister. Parce qu’ils savent qu’après, il y aura un suivi, des médicaments et on pourra mieux les prendre en charge. Ça se fait concrètement et maintenant, le Sida n’est plus le problème qu’il était il y a cinq ans. Nous espérons que ça va s’accélérer avec les résultats que nous avons sur le terrain. Ça ne s’arrête pas là parce que le travail que nous avons abattu jusqu’à présent avec le compteur des CD4, nous sommes entrain de le commencer avec les microscopes à fluorescence qui peuvent diagnostiquer le paludisme en deux minutes. Ce qui veut dire que c’est une nouvelle technologie qu’il faut une fois de plus accepter aux utilisateurs, il faut former des gens parce que ce sont des techniques qu’on n’apprenait pas jusqu’ici. Donc, il faut qu’on forme beaucoup de techniciens de laboratoire à cette nouvelle méthodologie, ce nouveau type de microscope pour la tuberculose, le paludisme. Nous sommes entrain de faire la recherche pour déterminer les meilleures méthodes pour d’autres parasites. Mais actuellement pour le paludisme, les résultats sont là, ils sont clairs et précis et on devrait passer simplement à la phase de leur utilisation.

En tant que manager de cette structure, comment ça se passe au quotidien ? Facile ou difficile ?

Partec Afrique centrale est en faite ma deuxième occupation. Je suis en plein dans mon élément ici parce que je suis enseignant-chercheur. Et une grande partie de l’activité de Partec Afrique centrale est la recherche. Etant donné que les problèmes auxquels s’attaquent les recherches de Partec Afrique centrale sont les problèmes de mon domaine de spécialisation à savoir le paludisme, les parasites. Je profite de l’appui de Partec pour poser des problèmes de recherches et de développement appliqué, j’encadre des étudiants. Donc, une bonne partie de mon activité d’universitaire est faite en collaboration avec Partec Afrique centrale. D’ailleurs, les dernières publications scientifiques que nous avons produites sont sur la base des résultats obtenus grâce aux équipements de Partec Afrique centrale.

Puisqu’on parle de santé, Partec Afrique centrale est-elle en bonne santé ?

Partec se porte bien parce que jusqu’à présent, nous sommes confiants surtout sur le côté technique de ce que nous faisons. Mais, une petite entreprise est toujours confrontée aux problèmes. L’argent étant le nerf de la guerre, nous sommes confrontés au problème de payement de nos factures. Nous sommes un peu asphyxiés à ce niveau parce que le contexte camerounais est particulièrement difficile. Nous essayons juste de nous battre pour tenir la tête hors de l’eau.

Quel message aux jeunes qui veulent se lancer dans l’entreprenariat ?

Je donnerai un conseil simple : il faut travailler dans un domaine qu’on aime, qu’on se sent apte. Créer une entreprise demande beaucoup de sacrifices, avoir la volonté de mettre sur pied un projet qui relève du rêve parce que, quand vous créez une entreprise, vous la créer d’abord dans votre tête en tant que projet. Quand vous passez à la phase d’exécution, c’est où les problèmes commencent. Si vous n’êtes pas assez fort, si vous n’étiez pas déterminer et que vous n’aimiez pas ce que vous allez faire, vous vous découragez très rapidement.

Entretien avec :

Frank William BATCHOU

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